lundi 14 décembre 2009

Le Québec se fait-il flouer?

Avertissement: À ceux qui sont écoeurés d’entendre parler de Copenhague, vous pouvez arrêter votre lecture ici.


Le Québec se fait-il flouer?

Récemment, ceux qui s’intéressent un peu à l’environnement et à la politique on droit à un spectacle digne des meilleurs cirques de la planète. Alors que se déroule le sommet de Copenhague, l’envergure mondiale de l’évènement le rend très particulier. En effet, tous se sentent concernés par la chose puisque les répercutions pourraient affecter l’ensemble de l’humanité. Le sommet a d’ailleurs le mérite de remettre en question le système capitaliste dans lequel nous vivons. Est-ce que protection de l’environnement peut rimer avec consommation? Il apparaît de plus en plus évident que nos habitudes de vie sont néfastes pour la planète et qu’il faudra nécessairement les changer.

Les cibles sont ambitieuses, mais au Canada on s’en tient à un faible objectif. En effet, le ministre de l’environnement Jim Prentice a annoncé que nos émissions devraient être réduites de 20% d’ici 2020 par rapport au taux atteint en 2006. Ça peut paraître beaucoup, mais il faut savoir que la plupart des pays utilisent 1990 comme année de référence alors que nos émissions ont augmenté de 22% entre 1990 et 2006. En résumé, la réelle cible des conservateurs est une réduction de 3% par rapport au niveau de 1990.

Ce que Jean Charest propose (en fait il n’avait pas vraiment le choix avec les pressions de l’opposition et de la population), c’est une réduction de 20% par rapport au taux de 1990. C’est une cible beaucoup plus ambitieuse, déjà que le Québec est la seule province ayant été capable de réduire ses émissions de 1990 à 2006 en passant de 82.7Mt CO2 éq. à 81.7. C’est beaucoup moins reluisant dans le cas des provinces du centre-ouest, l’Alberta et la Saskatchewan ont respectivement connus des augmentations de 37% et 63%, émettant à elles seules plus de 300Mt CO2 éq. dans l’atmosphère en 2006.

Le Québec est aussi la province ayant le plus faible taux d’émission par habitant avec seulement 362 kg CO2 éq./habitant en comparaison avec plus de 2275 pour la Saskatchewan et 1609 pour l’Alberta. Bien sûr, nous avons ici la chance de tirer notre énergie de l’hydro-électricité, ce qui est bien moins polluant que l’extraction du pétrole à partir des sables bitumineux, mais reste que ces chiffres sont plutôt ahurissants.

À la lumière des piètres résultats du Canada avec l’accord de Kyoto, le pays est maintenant perçu comme l’un des grands pollueurs par le reste de la planète. Manifestement, le Québec, malgré ses efforts plus appréciables, passe complètement dans l’ombre des inepties conservatrices que nous servent maintenant M. Harper et sa bande. Il est insensé de ne rien faire dans une telle situation, les intérêts des habitants du Québec (et de ceux de d’autres provinces comme l’Ontario ou la Colombie-Britanique) ne sont pas respectés sous prétexte de la rentabilité des sables bitumineux.

En effet, il faut savoir que la majeur partie de la péréquation que le Québec reçoit provient de l’Alberta et de l’argent du pétrole. Mais jusqu’à quel point l’économie doit-elle primer sur les causes sociales ou environnementales ? C’est la question qui se soulève actuellement à Copenhague où la surconsommation et les autres habitudes capitalistes sont fortement montrées du doigt.

Dans une telle optique, le Québec ne serait-il pas mieux en ayant un droit de parole au niveau international? Certes, notre poids, vu le faible nombre d’habitant, ne serait pas très élevé, mais nous pourrions enfin nous dissocier des actions du Canada qui ne reflètent aucunement notre opinion.

Je suis d’avis que, malgré lui, Stephen Harper est en train de réanimer le débat identitaire au Québec après sa mort totale en 95. Allez seulement lire les commentaires du blogue de François Cardinal qui couvre la conférence de Copenhague sur Cyberpresse, vous remarquerez la démarcation marquée d’opinion entre certains des lecteurs. Le problème est que trop peu de gens s’y intéressent pour l’instant. Le Québec n’a plus de rassembleur à la René Lévesque pour motiver la population à moitié endormie. Ce laxisme est certainement en partie attribuable aux émissions américanisées comme Loft Story et Le Banquier. Pour faire une analogie, on peut comparer la télévision d’aujourd’hui à de la bouffe d’hôpital molle pour les « vieux » : Ça s’avale bien sans forcer.

Daniel Bélanger chantait: « Quelqu’un m’a dit que tout autour de mon nombril se trouve la vie ». Si les gens commençaient à voir plus loin que le leur, peut-être que les choses pourraient bouger, mais pour l’instant c’est sans espoir.


* Les données sont tirées du rapport canadien sur les émissions de GES publié en 2008 par le ministère de l’environnement.

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